Survie

Congo-Brazzaville : Brazzaville, capitale des forestiers de choc

(mis en ligne le 1er mars 2005)

Le 5 février s’est tenu à Brazzaville un grand raout international sur la préservation des forêts primaires du bassin du Congo, aujourd’hui saccagées à une allure folle par les mafias forestières. Après les États-Unis, c’est la France qui prend pour deux ans la présidence du soutien international aux initiatives de protection - alors que la Françafrique chiraco-pasquaïenne est la grande protectrice des « pillards de la forêt » [1]

Les mafias ne font pas que couper à tout va les essences précieuses, elles adorent les contextes hors-la-loi favorisés par les guerres civiles. Comme l’a montré Global Witness, elles ont joué un rôle essentiel dans le business du fauteur de guerres civiles libérien Charles Taylor. Une enquête de l’ONU a pointé tout particulièrement le forestier Gus van Kouwenhoven, champion des deals armes/grumes au Liberia (cf. Billets n° 99). Le Conseil de sécurité l’a sanctionné d’une interdiction de voyager.

Or le ministre congolais de la Forêt, Henri Djombo (par ailleurs président de la COMIFAC, Conférence des ministres en charge des forêts d’Afrique centrale), a admis le 4 février sur RFI que ce Gus van Kouwenhoven opérait tranquillement au Congo-Brazzaville... (avant d’être laborieusement démenti par son gouvernement). La paix et la forêt sont bien protégées.

Accessoirement, la participation de Jacques Chirac à ce raout lui a permis de dîner en tête à tête avec le criminel contre l’humanité Denis Sassou Nguesso [2] et de traiter avec dédain, en conférence de presse, un journaliste qui voulait évoquer le massacre des 353 “disparus” du Beach. Les dictateurs françafricains continuent de bénéficier d’un garde rapproché.

François-Xavier Verschave

[1Cf. Agir ici et Survie, Le silence de la forêt, L’Harmattan, 2000 ; Arnaud Labrousse et François-Xavier Verschave, Les pillards de la forêt, Agone, 2002.

[2Dans son numéro du 10/02/2005 qui s’attarde longuement sur ce personnage, Le Gri-Gri International rappelle utilement que Denis Sassou Nguesso a fait sa formation d’officier à Cherchell (Algérie), à partir de 1961, soit avant la fin de la guerre d’indépendance. À cette époque, l’enseignement militaire était archi-dominé par les doctrines Lacheroy-Trinquier de la guerre « révolutionnaire », « moderne », « antisubversive », « psychologique », « totale »... développées pendant la guerre d’Algérie, épanouies dans la co-belligérance avec les forces génocidaires rwandaises. Ces mêmes doctrines furent mises en œuvre par Sassou, ses miliciens et ses légions étrangères durant la sauvage répression de la région du Pool (1999-2003).

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 134 - Mars 2005
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