Survie

Cameroun de tous les dangers

(mis en ligne le 25 juillet 2010) - Odile Tobner

L’ONG International Crisis Group (ICG) vient de publier un rapport intitulé « Cameroun, les dangers d’un régime en pleine fracture » [1]. Ses conclusions sont sans appel : la France « maintient le pays “sous sa coupe” au détriment de la démocratie et de l’économie camerounaise. »

Cette ONG, aux patronages et conseillers assez éclectiques, représentant un ensemble de financiers et hommes politiques influents
dans la sphère occidentale sous influence des États-Unis ne constitue pas, loin de là, un repaire de révolutionnaires.

Son diagnostic sur l’état de déliquescence dans lequel s’enfonce le Cameroun n’en est que plus inquiétant. Tous les ingrédients d’une situation explosive sont désignés et décrits : la corruption généralisée, l’état d’esprit de l’armée et du parti au pouvoir, l’exaspération de la population qui a conduit déjà aux tragiques journées de février 2008.

Dans les conclusions la politique française est explicitement remise en cause : « La position de la France, très en vue en raison de son passé d’ancienne puissance colonisatrice et de l’importance de sa présence économique au Cameroun, est préoccupante. Elle est à la fois critiquée
par beaucoup de Camerounais qui lui reprochent de soutenir le régime Biya mais aussi par certains de ses pairs de la communauté internationale qui estiment qu’elle maintient le pays « sous sa coupe
« au détriment de la démocratie et de l’économie camerounais
e. »

L’approche de l’échéance présidentielle de 2011, verrouillée en faveur de Biya par une réforme constitutionnelle et par la mainmise sur l’organisme de contrôle de l’élection Elecam, laisse craindre le pire, au point que les plus lucides parmi les Occidentaux se font les champions d’un changement même brutal : « Même si des groupes et des intérêts nationaux et étrangers estiment que sortir du statu quo leur serait préjudiciable, la situation impose aujourd’hui la réalisation de réformes importantes pour éviter une explosion ou une situation chaotique qui aurait des répercussions négatives pour tout le monde.

Le chantage à la « stabilité » des autorités (« il ne faut rien changer sinon le pays va exploser »), repris par une partie de la communauté internationale, n’est plus longtemps viable. [...] Ces réformes créeront inévitablement des agitations, susceptibles de dégénérer de multiples
façons ; pourtant, le choix du statu quo est finalement porteur de risques bien plus importants. »

Reste à voir ce que les apprentis-sorciers internationaux mijotent pour remplacer un pouvoir installé contre les intérêts de la population et devenu nuisible même pour la bonne exploitation du Cameroun.

[1Rapport d’Afrique n°161 – 24 juin 2010
disponible sur www.crisisgroup.org

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 193 - Juillet 2010
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