Une nouvelle étude paysanne burkinabè [1] est venue prouver que le coton OGM de Monsanto a appauvri les paysans et fragilisé encore davantage l’économie rurale.
Le coton est un élément fondamental dans l’économie du Burkina Faso (la filière concerne directement 30 % de ses 18 millions d’habitants), qui est aussi une des principales sources de revenu de la population. Ce pays d’Afrique de l’Ouest était réputé mondialement pour la qualité de sa fibre de coton, une production qui représente actuellement 70 % de ses exportations et 4 % de son PIB.
À la fin des années 1990, la filière fait face à des difficultés par l’apparition de parasites qui résistent aux insecticides. Ainsi la firme Monsanto propose son Coton dit « Bt », qui produit lui-même la toxine et donc permettrait de se passer d’insecticide, de diminuer les coûts de production et ainsi d’augmenter le rendement. La multinationale convainc le gouvernement du Burkina Faso ainsi que la Sofitex, principale société cotonnière du pays et l’Inera, Institut de l’environnement et de recherche agricole burkinabè.
Violant le protocole de Cathagène, signé 3 ans plus tôt, les expérimentations commencent dès 2003 sans aucune étude d’impact au préalable, sans débat public et sans agence de contrôle. L’exigence d’une réglementation et d’un contrôle sur les risques biotechnologiques n’est pas respectée. L’agence nationale de biosécurité ne sera créée qu’en 2005, et l’apparition d’une législation sur les biotechnologie en 2006. Le coton Bt passe à la phase de production et commercialisation en 2008.
En parallèle, la Coalition pour la Protection du Patrimoine Génétique Africain (COPAGEN) se crée en 2004, issue d’une multitude d’associations citoyennes et paysannes d’Afrique de l’ouest. Elle représente la société civile dans les enjeux de souveraineté alimentaire et pour faire face à la privatisation des ressources génétiques. Elle a enquêté auprès de 203 producteurs de coton et analysé les comptes des campagnes 2015 et 2016, pour connaître les réelles conséquences de la semence transgénique et dresser un bilan bien différent de celui de la firme1. Méthodiquement, l’étude reprend point par point les promesses de Monsanto :
L’étude soulève d’autres points comme l’apparition d’une résistance de la chenille ciblée par l’insecticide, ce qui force les paysans à recourir aux traitements sur une culture pourtant censée pouvoir s’en passer. Elle fait également état d’une gestion des risques désordonnée, du manque de formation et d’informations des paysans et d’une réglementation incomplète, ce qui aggrave le bilan des autorités burkinabè et de la multinationale.
Depuis la fin de l’année 2014, à la suite du soulèvement populaire qui a « balayé » le régime de Compaoré, les libertés se sont accrues et notamment celle de s’exprimer sur le coton Bt [2]. Par la suite, des collectifs se sont rassemblés pour « marcher contre Monsanto », et organiser la première Rencontre Internationale de Résistance (RIR) aux OGM en 2016. Face à cela, les autorités ont planifié un retrait progressif du coton Bt des surfaces cultivées, pour qu’en 2018, il n’y ait plus un seul champ de coton OGM cultivé. De plus, les sociétés cotonnières du pays ont demandé un dédommagement de 50 milliards de francs CFA à Monsanto pour les pertes liées à la vente du coton de moins bonne qualité.
Fin avril 2017, se tenait à Lorient, la seconde édition des RIR OGM, avec pour but de réunir les paysans et les citoyens des 5 continents derrière la lutte contre les OGM.
[1] « Le coton Bt et nous, la vérité de nos champs », étude réalisée par la COPAGEN, avec pour partenaires CCFD-Terre Solidaire et Inter Pares, mars 2017.
[2] Sous la dictature de Blaise Compaoré, les voix résistantes peinaient à se faire entendre, voir « Compaoré livre les paysans ouest-africains à Monsanto... », Billets d’Afrique n°204, juillet-août 2011