"[P]rendre toutes les mesures en son pouvoir pour empêcher la promotion ou l’accueil d’entreprises, délégations ou intermédiaires susceptibles de participer à la perpétuation des crimes commis par Israël" dans les territoires palestiniens : c’est ce que les associations Stop Fuelling War, les Amis de la Terre France, Survie, l’Union juive française pour la paix (UJFP), et l’ONG palestinienne Al-Haq avaient demandé aux organisateurs du Salon international de l’armement du Bourget qui se tiendra du 16 au 22 juin 2025. Suite au rejet par le tribunal judiciaire de Bobigny, les associations ont porté cette requête devant la Cour d’Appel de Paris. Cette dernière a de nouveau formulé une réponse négative. Une décision qui interroge sur l’état de droit en France face aux intérêts économiques des multinationales.
La Cour d’appel estime que « les imputations relatives à la complicité et au recel de crimes de guerre et à la violation du droit à la dignité et du droit à la vie sont sans lien avec les obligations imposées dans le contrat quant au respect de la réglementation et du droit ». Les sociétés de droit privé ne devraient pourtant pas être au dessus des lois, à fortiori celles qui interdisent la complicité des crimes internationaux les plus graves.
Ce nouveau rejet ignore donc ce qui ne fait aucun doute : la vente des armes et composants provenant de multinationales du monde entier sont la condition première à la perpétration de crimes dans le cadre de conflits armés dont le nombre de victimes ne cesse d’augmenter. En négligeant la dimension complice des relations économiques qui pourraient se nouer au sein du Salon, la justice française permet à la société organisatrice, le SIAE, d’offrir une tribune et une visibilité commerciale aux personnes privées et aux sociétés qui se rendent co-autrices des pires violations au regard du droit national et international. Cette promotion sur le site du salon depuis des mois est en tant que telle un renforcement économique de ces sociétés et une assistance importante aux crimes. Aussi, l’accueil au salon permet la signature de contrats faramineux : l’édition de 2023 a généré 150 milliards d’euros de vente [1].
L’argumentaire déployé par la partie adverse, à qui les juges avaient décidé de donner raison, mobilise la notion d’ « acte de gouvernement » [2]. Les ventes d’armes réalisées sur le sol français seraient trop intimement liées à la politique étrangère de la France pour que la justice ait son mot à dire dessus, et il incomberait au seul gouvernement d’interdire la venue d’entreprises et délégations qui participent aux crimes internationaux les plus graves. Cette interprétation trop extensive de la notion d’acte de gouvernement empêche le droit de regard légitime du justiciable et nie la responsabilité partagée des acteurs privés tels que le salon du Bourget et les multinationales de l’armement dans l’alimentation de ces crimes.
Ces questions d’armement nous impliquent pourtant toutes et tous au nom de la dignité humaine, d’autant que le gouvernement choisit de placer les impôts dans l’enrichissement de ces géants de l’armement plutôt que dans les services publics.
Mais tout n’est pas perdu ! Face à l’urgence de la situation en Palestine, nous sommes déterminé-es à exploiter chaque voie de recours disponible dans le droit français pour défendre la dignité des palestinien-nes et pour ramener les multinationales de l’armement sous le contrôle de la loi !
Pour soutenir cette action en justice qui coûte cher , nous avons besoin de vous : https://tinyurl.com/237saf5n
Une action en justice avait aussi été déposée pour empêcher le soutien économique du salon du Bourget à des entreprises qui participent indirectement aux crimes internationaux en Ukraine et au Soudan - crises humanitaires incommensurables également alimentées par les multinationales de l’armement que les associations ne cessent de dénoncer - mais devant le risque financier et le peu de moyen associatif, cette procédure a dû être abandonnée.
En résonance avec le contexte de mobilisation croissante contre l’inaction des autorités françaises face au génocide en cours à Gaza [3], cette action est menée avec la coordination des recherches et de la stratégie juridique par le collectif Droit & Mouvements Sociaux (DMS) et avec le soutien dans leur démarche de la coalition Guerre à la guerre.
Pour en savoir plus sur les perspectives à venir pour cette action en justice, nous vous convions à une conférence de presse le lundi 16 juin 2025 à 14h devant le Parc des expositions du Bourget. À cette conférence seront également présents les membres de la coalition Guerre à la Guerre et de la dynamique Stop Bourget qui préparent un grand week-end de mobilisation contre le salon les 20, 21 et 22 juin prochain.
Contacts presse :
Al-Haq, joel.alhaq@gmail.com
Droits et Mouvements Sociaux, Droitetmouvementssociaux@proton.me
Survie, camille.lesaffre@survie.org
Coalition guerre à la guerre (qui regroupe une vingtaine de collectifs dont les Soulèvements de la Terre, Stop Arming Israel France, Urgence Palestine, la Marche des Solidarités)
[2] C’est cette notion qui nous a été opposée pour justifier la non poursuite des enquêtes sur les responsables militaires et politiques français dans l’affaire Bisesero : https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/nos-actions-en-justice/article/responsabilites-francaises-dans-le-genocide-des-tutsis-la-justice.