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Comment l’État français fait le jeu de Total en Ouganda

Les Amis de la Terre France, l’Observatoire des multinationales et Survie publient aujourd’hui une nouvelle enquête inédite : "Comment l’État français fait le jeu de Total en Ouganda". Elle nous plonge au cœur des stratégies d’influence mises en place par la multinationale pour s’assurer le soutien - diplomatique, économique et militaire - des autorités françaises dans le développement de son méga-projet pétrolier dans ce pays. Au cœur de cette machinerie se trouve le système des portes tournantes : le rapport révèle l’étendue des allers-retours de hauts fonctionnaires entre Total et différents ministères et institutions-clés.

Alors que les impacts dévastateurs sur les droits humains et l’environnement des projets Tilenga (extraction pétrolière) et EACOP (oléoduc géant) de Total en Ouganda et Tanzanie ont largement été documentés [1], et font l’objet d’une action en justice [2] et d’une mobilisation croissante, il n’y a pas que la major pétrolière qui ne tient aucunement compte des nombreuses alertes de la société civile et des scientifiques. En effet, l’État français, en totale contradiction avec ses discours en faveur des droits humains et du climat, met tous ses moyens au service de Total pour que ces projets néfastes aboutissent.

Notre enquête explique ainsi en détail comment des institutions publiques (Élysée, ministère des Affaires étrangères, ambassade de France en Ouganda, BPI, AFD, CDC, APE, armée), censées représenter et défendre l’intérêt général, sont dévoyées au profit du pétrole et des intérêts privés d’une multinationale.

Olivier Petitjean, de l’Observatoire des multinationales, explique : « Les “portes tournantes” sont au cœur de la stratégie d’influence de Total : le groupe débauche d’anciens hauts fonctionnaires et responsables politiques, ou bien au contraire encourage ses cadres à retourner dans la fonction publique, avec pour résultat d’entretenir la confusion entre les intérêts de Total et de ses actionnaires et ceux de la France ».

Juliette Renaud, des Amis de la Terre France, réagit : « Grâce aux portes tournantes et au sponsoring d’événements publics, les intérêts de Total semblent avoir infiltré l’Etat français de toute part. Au nom de la diplomatie économique, l’ambassade à Kampala, le ministère des affaires étrangères et jusqu’à Emmanuel Macron lui-même [3] apportent un soutien aveugle à ces projets climaticides, qui privent déjà plus de 100 000 personnes de leurs moyens de subsistance en Ouganda et en Tanzanie. Alors que la France prépare de nouveaux beaux discours sur la scène internationale à l’occasion de la COP26, il est temps que l’Etat français cesse de faire le jeu de Total ! »

Thomas Bart, de Survie, conclut : « Alors qu’en Ouganda, la répression de la société civile et des voix dissidentes qui cherchent à dénoncer les violations des droits humains et les atteintes à l’environnement est de plus en plus forte, le gouvernement français n’hésite pas à développer sa coopération militaire avec le régime autoritaire ougandais. Ce dernier a annoncé le déploiement de nouveaux contingents militaires pour “protéger” les futures installations pétrolières… Sur place ces forces sont utilisées pour faire taire toute opposition au projet de Total ».

Contacts presse :

  • Amis de la Terre France : Juliette Renaud - 06 37 65 56 40 - juliette.renaud@amisdelaterre.org
  • Observatoire des multinationales : Olivier Petitjean - 06 08 27 39 89 - opetitjean@multinationales.org
  • Survie : Thomas Bart - 07 70 06 90 53 - thomas.bart@protonmail.com

Retrouvez ici une présentation vidéo de ce rapport

Comment l’État français fait le jeu de Total en Ouganda

[1Pour plus d’informations sur les violations des droits humains et risques environnementaux de ces projets, voir la dernière enquête de terrain des Amis de la Terre France et de Survie, ainsi que celles de la FIDH et d’Oxfam America (2020).

[2Pour plus d’information sur l’action en justice lancée par les Amis de la Terre France, Survie et quatre associations ougandaises, voir la note : Total Ouganda – Première action en justice sur le devoir de vigilance des multinationales : où en est-on ? (2020). Une audience à la Cour de cassation doit se tenir le 3 novembre 2021, concernant le tribunal compétent, lequel fait aussi l’objet d’une bataille parlementaire.

[3Voir notamment la lettre d’Emmanuel Macron au président d’Ouganda au printemps 2021.

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