Survie

Des conditions de vie, d’emploi et de travail proches de l’esclavage

Publié le novembre 2003 - Survie

12 à 15 heures par jour. Jamais 6 heures de sommeil continu. 97 heures par semaine pendant trois mois. Fréquentes erreurs dans la planification et l’exécution des traversées. Je n’osais pas m’asseoir pendant le quart [1].

Ces commentaires, extraits d’une enquête à laquelle ont participé quelques 2500 gens de mer, n’étonnent
malheureusement pas la grande majorité des marins qui connaît trop souvent des conditions de vie, de travail
et d’emploi dramatiques et par-là même dangereuses.

Surmenage

Cette enquête montre l’insuffisance de personnel à bord des navires. Or, alors que les équipages sont
réduits, le temps passé dans les ports a lui aussi été considérablement raccourci.

La fatigue liée au surmenage étant une des causes des sinistres graves tant humains qu’écologiques, de
nombreux enquêteurs examinent désormais les horaires et les conditions de travail lorsqu’ils évaluent les causes
d’un accident. Et les résultats sont surprenants !

Dangers...

A titre d’exemple, en mars 2001, la Commission internationale sur les transports maritimes (ICONS) [2], commission d’experts indépendante constituée pour enquêter sur la sécurité des navires, a publié un rapport sans complaisance : "Navires, esclaves et concurrence" [3]. Ce rapport révèle que des dizaines de milliers de marins sont traités comme des esclaves, craignant d’être jetés par-dessus bord s’ils osent se plaindre.

Toujours selon l’ICONS, les équipages de 10 à 15 % des navires dans le monde travaillent dans des conditions
dangereuses
, pour des salaires médiocres, voire inexistants, et sont sous-alimentés, violentés et roués de coups. La Commission, sous la présidence de l’ancien ministre des Transports australien, Peter Morris, a également constaté que des membres d’équipage avaient disparu après s’être plaints de leur sort.

... et conséquences

Dans de telles conditions, d’après une étude effectuée sur les marins britanniques [4] : les marins ont 26,4 fois
plus de risques de mourir sur leur lieu de travail
que les autres travailleurs.

Les marins de la pêche et de la marine marchande sont en tête de la liste des travaux les plus dangereux en
Grande-Bretagne : les pêcheurs courent 52,4 fois plus de risque d’avoir un accident du travail mortel et les
marins de la marine marchande 26,4 fois que les autres ouvriers britanniques. Les statistiques ont été tirées des
données couvrant la période entre 1976 et 1995.

Trop souvent les décès se produisent alors qu’ils auraient pu être empêchés par plus de prévention.
L’étude a constaté que sur un total de 1 405 décès de marins britanniques, 507 ont été provoqués par des
événements liés au travail tels que des noyades, des asphyxies dues aux vapeurs, etc.

[1Extrait d’une enquête retranscrite par l’ITF dans son rapport : Mondialisation - le coût pour les gens de mer. Commémoration de la Journée maritime
mondiale de l’OMI, le 27 septembre 2001

[3ICONS, "Ships, salves and competition", mars 2001. Texte intégral du rapport disponible sur le site Internet suivant : www.icons.org.au/images/ICONS-fullreport.pdf

[4Rapport publié par l’université d’Oxford et réalisé par Sandra Speares, retranscrit par la Lloyd’s list, août 2002

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