Le Rapport de la mission d’information parlementaire sur la politique de la France en Afrique qui devait être rendu public le mercredi 9 juillet n’a pas été validé par les députés, qui ont décidé de prolonger les travaux de la mission de 6 mois. Cette décision est le résultat du caractère parcellaire et « orienté » d’un rapport qui aborde la relation France-Afrique quasi-exclusivement sous l’angle économique et occulte les aspects politiques ou militaires de la politique de la France sur le continent.
En tant que membres de la plate-forme citoyenne France - Afrique, nos associations se félicitent que les relations entre la France et l’Afrique suscitent un vif débat parlementaire jusqu’au sein même de la majorité. Ceci montre également que la stratégie exclusive de défense des intérêts commerciaux français prônée par le Secrétaire d’Etat à la Coopération, Alain Joyandet, ne fait pas l’unanimité.
Dès la création en septembre 2007 de cette mission d’information sur les relations franco-africaines, la Plateforme citoyenne France-Afrique [1] a accueilli avec satisfaction le fait que le Parlement s’empare du sujet. Une première sous la Vème République, même si les réserves étaient de mise quant aux pouvoirs limités dont dispose une mission d’information parlementaire.
A la lecture du rapport soumis au vote le mercredi 9 juillet, force est de constater que l’ambition de promouvoir la démocratie et les droits de l’Homme (que la Plate-forme citoyenne France - Afrique a défendue lors de son audition devant la mission en avril [2]), risquait de céder définitivement la place à la protection de l’influence et des intérêts français. Le mot « investissement » apparaît ainsi 30 fois dans le texte, tandis que les mots « dictature » et « corruption » n’apparaissent jamais. Le mot « démocratie » est toujours cité pour souligner les avancées, jamais les manquements, alors que la France a soutenu et soutient encore des régimes autoritaires et/ou corrompus. Nos associations sont rassurées qu’une majorité des députés de la mission aient refusé de valider un texte qui fait fi du rôle joué par la France sur les plans politique, économique et militaire.
Toutefois, ce sursaut parlementaire ne sera salutaire que si la dynamique ainsi enclenchée permet d’aborder pleinement les sujets primordiaux qui caractérisent la relation entre la France et les pays africains. C’est pourquoi nos associations réitèrent leur désir de voir émerger de ce travail :
Afin que l’ensemble des propositions du rapport final puisse efficacement être mis en œuvre, il est primordial qu’un réel contrôle parlementaire et citoyen s’exerce en France et dans les pays africains, un contrôle démocratique qui passe par un soutien affirmé de la France aux processus démocratiques et de lutte contre la corruption, seule alternative imaginable aux régimes autoritaires et/ou corrompus.
La mission s’est donnée une deuxième chance, à charge maintenant aux députés de corriger le tir.
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[1] La plate-forme citoyenne France-Afrique regroupe une dizaine d’ONG françaises : ATTAC, Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT-France), Centre de Recherche et d’Information pour le Développement (CRID), Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD), Cedetim/Ipam, Mouvement de la paix, Oxfam France - Agir ici, Peuples Solidaires, Réseau Foi et Justice Afrique Europe (Antenne France), Secours Catholique / Caritas France, Survie.
[2] A l’occasion de cette audition, la Plate-forme citoyenne France-Afrique a émis un certain nombre de recommandations issues de son Livre blanc pour une politique de la France en Afrique responsable et transparente (L’Harmattan), publié en novembre 2007.