L’association Survie publie ce jeudi un rapport avec des informations exclusives sur l’intervention d’un « corsaire de la République ». Sous une fausse identité, le célèbre mercenaire françafricain Bob Denard a aidé le gouvernement génocidaire, qui l’a rémunéré à Paris via la BNP. Cette intervention n’a pu se faire qu’avec la complaisance des autorités françaises. Ces révélations sont l’occasion pour Survie de rappeler que les procédures judiciaires en cours avancent trop lentement, quand elles ne sont pas délibérément sabotées
Le rapport publié aujourd’hui par Survie montre notamment que Bob Denard a dépêché des hommes pour certaines missions au Rwanda pendant le génocide, qu’il a été payé par le gouvernement génocidaire et que ce paiement s’est fait par l’intermédiaire de la banque française BNP, visée par ailleurs par une enquête pour complicité de génocide.
Ces révélations démontrent une nouvelle fois que l’implication des autorités françaises est multiforme, car elles ne pouvaient ignorer les activités d’un mercenaire resté régulièrement en contact avec les services de renseignement tout au long de sa carrière, y compris en 1994 sur le sujet du Rwanda. Ces informations confirment donc la nécessité de faire la lumière sur ce que l’État français savait et a décidé de faire avant, pendant et après le génocide, selon un fonctionnement institutionnel qui, pour l’essentiel, est toujours à l’oeuvre. Pour Survie, association mobilisée contre la Françafrique, l’exigence de vérité et de justice se double donc d’une nécessité de changer les lois et dispositions constitutionnelles actuelles françaises qui permettent de telles dérives et une telle impunité [1].
L’association rappelle que plusieurs démarches judiciaires avancent trop lentement, quand elles ne sont pas sur le point d’être enterrées :
Pour Survie, il est indispensable que ces procédures aboutissent au plus vite, avant que les suspects et les témoins ne soient plus là. Faire en sorte que ces procès aient lieu, même 24 ans après le génocide, est essentiel : l’enjeu est judiciaire, mais également démocratique, pour conduire enfin au changement des institutions qui ont permis à l’Etat français d’être complice de génocide.
[1] Voir les annexes 1 et 2 du rapport.
[2] Voir le communiqué commun [« La FIDH, la LDH et Survie déposent plainte contre Paul Barril pour complicité de génocide au Rwanda »→https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/nos-actions-en-justice/article/la-fidh-la-ldh-et-survie-deposent-4498], 25 juin 2013
[3] Voir le communiqué commun de la FIDH, la LDH et Survie, [« Opération Turquoise / massacre de Bisesero : la justice refuse d’auditionner les plus hauts responsables militaires français »→https://survie.org/themes/genocide-des-tutsis-au-rwanda/nos-actions-en-justice/article/operation-turquoise-massacre-de-bisesero-la-justice-refuse-d-auditionner-les], 16 novembre 2017
[4] Voir le communiqué « Livraisons d’armes au Rwanda pendant le génocide des Tutsis : Survie porte à nouveau plainte et se constitue partie civile », 29 juin 2017
[5] Voir l’article 698-1 du Code de procédure pénale. Malgré le principe de séparation des pouvoirs, le ministère public a attendu plus de quatre mois afin d’exercer sa mission, dans l’attente d’un avis qu’un organe du pouvoir exécutif avait un mois pour donner.